Vincent Battesti - vbat.org | anthropoasisvbat.org
Français → Travaux/ écrits → Publications

De Siwa au Caire, la fabrique du patrimoine se nourrit du désir des autres

Art. Égypte/Monde arabe (2009).

Vincent Battesti

De Siwa au Caire, la fabrique du patrimoine se nourrit du désir des autres.
in Omnia Aboukorah et Jean-Gabriel Leturcq (dirs), Égypte/Monde arabe n°5-6, 3e série, 2009, Pratiques du patrimoine en Égypte et au Soudan, Le Caire, CEDEJ, p. 69-101.
ISSN : 1110-5097 - ISBN : 2-905838-44-2
DOI : 10.4000/ema.2893
Fichier pdf : https://hal.science/halshs-00350121/fr/

Alain Roussillon †. Ce numéro fut lancé sous l’impulsion et la direction d’Alain Roussillon.
Il décéda sans terminer ce travail. Je dédie spécialement cet article à sa mémoire.

Enfants dans une rue de Manshiyya, oasis de Siwa, désert Libyque, Égypte, le 5 janvier 2004, Vincent Battesti

 Voir l’appel à proposition de ce numéro d’EMA sur le site web du CEDEJ.

 En ligne sur Revues.org : http://ema.revues.org/index2883.html

 Proposition en deux lignes :
L’idée est de comparer la mise en patrimoine au Caire et à Siwa.
Si l’un des principaux modes de production du patrimoine est proprement stratégique, il faudra éclaircir ce que l’intervention au Caire sur le bâti du centre-ville et les jardins publics a pour visée (The Giza Zoo : Re-Appropriating Public Spaces, Re-Imagining Urban Beauty). Ce processus patrimonial ne soulève aucunement les passions des foules, ne provoque pas de conflits faute de combattants. Pour autant, ce n’est pas une opération blanche. D’une part, on notera que ses agents sont précisément les héritiers d’une classe qui se sent dépossédée d’un territoire qu’elle espère reconquérir, et d’autre part toute tentative de redessiner, revaloriser, retoucher un cadre de vie coexiste inévitablement avec la volonté de redessiner les comportements, l’éthos urbain. Adoptant le vocabulaire d’une sociologie urbaine (Joseph, 1998), on dirait qu’en jouant sur les dispositifs, c’est sur les dispositions que l’on espère intervenir pour dresser et moraliser « le petit peuple », stigmatisé comme sale, indiscipliné et infréquentable, pour peut-être réinscrire d’anciennes normes comportementales, aujourd’hui largement dépassées par l’invention par les classes populaires de nouvelles ambiances urbaines.

Pour ce qui est, ensuite, de l’oasis de Siwa, un phénomène contemporain très important de mise en patrimoine touche en particulier le bâti (De l’habitation aux pieds d’argile, Les vicissitudes des matériaux et techniques de construction à Siwa (Égypte)) et l’objectif est sans ambages le tourisme (même si l’on parle aussi de plus-values en termes de qualité de vie pour les habitants).

Loin apparemment des problématiques à la mode de « patrimoine immatériel », il s’agit dans les deux cas d’architecture : on est ici dans le concret, on est dans le lourd, on est dans le bâtiment. Cependant, l’un à Siwa s’invente son style traditionnel local pour le présenter comme authentique patrimoine aux étrangers, et l’autre au Caire exhume un passé clairement de tradition européenne, pour le présenter comme patrimoine de droit sur la scène locale et, me semble-t-il, évacuer « l’intrus » (les dispositions des classes populaires) de la scène cairote moderne.

Les acteurs de la patrimonialisation, à Siwa et au Caire, parlent d’architecture pour finalement parler toujours d’autre chose.

 Une retombée de cet article : une réflexion sur la définition de « patrimonialisation ».

J’ai dû préciser ma façon de définir la notion de patrimonialisation. Cette définition personnelle (encore en chantier) insiste sur son caractère construit :

« La patrimonialisation, entendue comme la fabrique du patrimoine, est la mise en patrimoine d’un ou de plusieurs éléments d’objets matériels ou immatériels, c’est-à-dire les opérations par lesquelles des acteurs font le choix, en les figeant, d’extraire d’une réalité sociale des éléments qu’ils considèrent liés au passé et à valoriser à des fins économiques ou symboliques, en considérant qu’ils font sens dans l’Histoire (quelle qu’en soit l’échelle). »

 Télécharger l’article au format pdf :

De Siwa au Caire, la fabrique du patrimoine se nourrit du désir des autres
in Omnia Aboukorah et Jean-Gabriel Leturcq (dirs), Égypte/Monde arabe n°5-6, 3e série, 2009, Pratiques du patrimoine en Égypte et au Soudan, Le Caire, CEDEJ, p. 69-101.
Couverture Égypte/Monde arabe n°5-6, 3e série, 2009
Représentation du patrimoine architectural
Siwa (Égypte), le 5 janvier 2004, © Vincent Battesti
Le feu dans un immeuble haussmannien
Le Caire (Égypte), le 27 août 2005, © Vincent Battesti
Cet article a été lu 2876 fois.
forum

Poster un message / Répondre à cet article

Dernière mise à jour de cette page le jeudi 24 août 2023 à 17:30:13. //// -----> Citer cette page?
Vincent Battesti , "De Siwa au Caire, la fabrique du patrimoine se nourrit du désir des autres " (en ligne), Anthropoasis | vbat.org, page publiée le 22 décembre 2009 (visitée le 26 avril 2024), disponible sur: https://vbat.org/article418

info portfolio