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Conf. (en français) donnée dans le cadre du séminaire « Anthropologie générale — À l’interface des sciences sociales et des sciences naturelles » coordonné par Charles Stépanoff, Andrea-Luz Gutierrez-Choquevilca et Claudine Cohen, pour « Paris Sciences et Lettres » Research University EPHE - EHESS - ENS, au Collège de France,
à Paris (France), le 19 janvier 2017, 17h-19h.
Le présent séminaire propose une initiation aux approches pluridisciplinaires abordant l’homme dans ses dimensions biologiques et culturelles en interaction avec son environnement. La dichotomie entre nature et culture, qui scinde l’étude de l’humain entre une réalité biologique et une réalité sociale, doit être dépassée si l’on entend construire « une anthropologie, c’est-à-dire un système d’interprétation rendant simultanément compte des aspects physique, physiologique, psychique et sociologique de toutes les conduites » (Claude Lévi-Strauss).
– Des questions qu’on se pose en ethnoécologie ? Illustrations oasiennes
– Présentation :
Cette intervention présentera ce que l’ethnoécologie, l’étude des interactions (cognitives et pratiques) tissées entre des sociétés humaines et leur environnement, a pour ambition, et cela illustré par l’exemple concret de mes propres recherches de terrain en anthropologie sur les oasis sahariennes. Il s’agit non seulement d’établir les manières dont les groupes humains — les localisées, les globalisés et nous y compris — pensent l’organisation du monde qui les entoure et ses relations internes, leurs relations à lui et aux non-humains (une écologie générale en fait), mais aussi comment se pratiquent concrètement ces interactions dans des situations données. Nous verrons qu’une approche très matérialiste de jardins d’oasis peut déboucher sur des propositions qui tentent de théoriser l’emploi de diverses ressources socioécologiques et nous verrons qu’une approche plus théorique (mais issue du terrain) sur les modes de catégorisation du vivant dans une oasis peut déboucher a contrario sur des relectures très pratiques de l’agrobiodiversité locale.
Messages
Bonjour,
je suis doctorant en géographie et je travaille sur les oasis de Touat, Gourara et Tidikelt, sur les questions de l’agriculture oasienne par une entrée « foggara ».
je trouve le sujet que vous abordez dans cette présentation intéressant (même si je ne comprends bcp en anthropologie, en particulier en ethnoécologie), mais la relation que je mis avec la thèse que je prépare est que la compréhension de cette articulation entre les objets physiques ou matériels (bio dans votre cas ou « infrastructure » comme dans mon cas) avec les aspects immatériels d’ordres différents (social, institutionnel, ...), la compréhension de cette articulation peut aboutir à une meilleur compréhension du système étudié. pour les foggaras que j’étudie par exemple, on remarque une grande tendance vers leur patrimonialisation alors qu’on peut la voir autrement si on prend en considération le contexte dans lequel ce système a été développé. au cours du temps, il a subi plusieurs ajustements dont l’objectif est de répondre aux contraintes physiques et parfois socio-économiques de la zone. l’originalité du système résulte de la capacité d’adaptations à ces contraintes et essayer de le figer touche au point original du système qui est sa capacité d’adaptation. le message de la thèse est de mettre les transformation actuelles dans le système dans un processus très normal de l’adaptation aux contraintes par des ajustements matériels et immatériels.
Merci
Cher Idda Salem,
Oui, nous avons déjà été en relation épistolaire, je m’en souviens bien. Un jour, je viendrai dans les oasis de Touat, Gourara et Tidikelt…
Pour revenir à vos remarques, je suis bien d’accord avec vous : effectivement, il me semble difficile (en tout cas comme anthropologue) de ne pas toujours définir mes objets de recherche comme des articulations, entre des éléments du monde matériel d’une part et des pratiques et savoirs d’autre part. Dans votre cas d’une infrastructure, une foggara en l’occurence, elle n’a de sens que dans ce que les groupes sociaux peuvent en dire, peuvent la qualifier, en usent, la modifient etc.
Il existait évidemment un « programme initial » à son élaboration et sa construction (cela a créé un dispositif), puis une appropriation (physique ou non) de cet objet/système par les usagers (des dispositions), usagers qui non seulement changent au cours du temps, qui modifient leurs usages (et l’objet lui-même), mais aussi des usagers qui peuvent être divers à un temps « t » avec des objectifs qui peuvent diverger.
La patrimonialisation de la foggara aujourd’hui peut en effet sembler étrange si elle consiste à la « muséifier » (geler la forme d’un système adaptatif), mais sans doute existe-t-il des enjeux matériels et symboliques que j’ignore et sans doute que les promoteurs de cette patrimonialisation ne sont pas les seuls acteurs en jeu : il y a sans doute des « conflits » d’usages et de représentation sur cet objet foggara. Vous connaissez mieux la situation que moi.
Je me permets juste de vous indiquer un travail que j’ai produit sur cette notion de patrimonialisation qui pourrait vous intéresser : De Siwa au Caire, la fabrique du patrimoine se nourrit du désir des autres.
Bien cordialement,
Bonjour,
Merci pour ces explications,
soyez les bien venus dans le Touat, le Gourara et le Tidikelt,
de mon côté, je suis actuellement en France pour finaliser ma thèse (à Montpellier, Cirad, UMR G-eau),
si j’aurai l’occasion j’aimerai bien qu’on se parle un peu, car avec le temps je trouve que les aspects anthropologiques sont de plus en plus intéressants dans l’analyse de ce genre de problématiques.
Cordialement