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Conférence (en français) donnée dans le cadre du séminaire « Paysages culturels » de Hélène Artaud, Frédérique Chlous, Marie Roué au Muséum national d’histoire naturelle,
Paris (France), le 15 janvier 2015, 17h-19h30.
– Le « paysage culturel » est un pléonasme et le « paysage sonore » un outil de travail
Dédicace à Didier Bouillon, ami et collègue, anthropologue, professeur à l’École nationale supérieure du paysage (ENSP), bêtement décédé d’un cancer à l’automne dernier.
– En quelques mots :
Je suis toujours très (trop ?) prudent sur l’usage du terme « paysage », le considérant comme un concept situé (dans le temps et l’espace) et considérant la présence locale de ce « concept » dépendante d’une relation particulière des membres d’une société à son environnement. Le « paysage » est une possibilité, mais pas la seule. Mais, pour autant je l’ai souvent employé, et notamment dans l’expression de « paysage sonore », mais avec une acception très restreinte.
Pourquoi se méfier du « paysage » ? C’est que sur mon terrain principal actuel (oasis de Siwa, Égypte), le « rapport au paysage » n’a presque pas de sens en fait. Je ne saurai vraiment traduire « paysage » en arabe local ou berbère. Peut-être par « point de vue » (mandhar, mais qui renvoie localement surtout à la « forme »), mais les panoramas (points de vue depuis un des nombreux points surélevés de la géographie locale) ne sont pas appréciés par les gens de Siwa. D’où ce titre d’article : « « Pourquoi j’irais voir d’en haut ce que je connais déjà d’en bas ? » Comprendre l’usage des espaces dans l’oasis de Siwa » (Battesti, 2006). J’ai parlé un moment de « paysage au niveau du sol, par le bas », par le parcours. Sans en faire une religion, c’était davantage pour expliciter la perception locale des espaces par la population locale. Au sens propre, je n’ai pas de paysage dans ces oasis. Même si les touristes de passage font le plein de photographies de paysage. Par contre, l’ambiance était tout autre au Yémen, où on se délectait des panoramas en montagne. Sans savoir si nous avons vraiment à faire à des paysages, nous pouvons discuter d’une de ses modalités nécessaires, me semble-t-il, « l’appréciation des points de vue » (voir Augustin Berque).
Et le Paysage sonore ? « Ce qui permet de distinguer « environnements sonores » de « paysages sonores » est, à mon sens, la régularité ou la reproductibilité de l’évènement sensoriel, de l’ensemble des effets sonores qui permet de qualifier, d’identifier une signature sonore complexe d’un territoire. » (Battesti, 2013 : 85)