– Théories de la pratique vs phénomènes culturels
Les Pokémons efficaces.
Printemps 2001 - Taez - Yémen.
Les Pokémons sont au centre d’un vif débat au Yémen : doivent-ils être autorisés ou être interdits ? Il seront finalemnt interdits, tout comme en Arabie saoudite.
Il leur est reproché de corrompre la jeunesse ; les Pokémons sont un instrument sioniste. Pour preuve, une étoile de David repérée sur l’une des cartes à jouer, les règles du jeu qui sont judéo-capitalistes et la rumeur qui veut que Pokémon se découpe éthymologiquement en japonais par “Poké” (“pas”) et “Mon” (“Dieu”).
Mes sources sont diverses discussions dans Taez en 2001 et particulièrement un débat que j’ai lancé sur la rumeur en classe avec les 4e années du département de français de l’Université de Taez (Faculté des Lettres).
“Mais ce n’est pas une rumeur, monsieur ! c’est vrai !”
Même le major de promo soutenait la rumeur.
Le plus curieux n’est pas l’espèce de paranoïa généralisée dans le monde arabe, en particulier vis-à-vis d’Israël et son ami américain, mais l’efficacité de “Pokémon”. Car il ne suffit pas que Pokémon veuille dire en japonais “Pas de Dieu”, mais l’idée est qu’à force d’usage, la répétition de ce mot corromprait l’âme des jeunes musulmans yéménites innocents. Plus ils répètent leur propos blasphématoire — même sans comprendre le sens du mot en japonais —, plus leur âme se persuaderait de l’inexistence de Dieu : habile stratagème mis en place par les agents sionistes.
Cela en dit certes beaucoup sur le rôle de l’éducation, la méthode pédagogique, mais tout autant sur l’efficacité des mots, le caractère performatif de la parole : on pourrait attribuer un caractère magique à ce phénomène.
– Plus d’informations (y compris sur le versant des controverses religieuses pour le christianisme, le judaïsme et l’islam) sur le site Wikipedia, article Pokémon.