Guérin F.-E. (sous la direction de) - Dictionnaire pittoresque d’histoire naturelle et des phénomènes de la nature, Paris, Au bureau de souscription, 1838, T. 6.

p. 172

"OASIS : Dans la mer de sables mouvans qui constitue les longs déserts de l’Afrique centrale, à peu de journées et à l’ouest du Nil, se trouvent quelques portions de terres heureuses, où l’agriculture brille depuis de longs siècles ; elles sont situées au milieu de bassins privilégiés, ouverts dans la direction du sud au nord, et où se rend le peu d’eau qui tombe, à certaines époques, sur la chaîne des monts de la Libye. Les trois plus considérables de ces vallées dites El-ouâhh ou Oasis, que, dans leur langue toute poétique, les vieux Grecs comparaient à des îles de verdure, élevées sur la plaine sablonneuse (…) [L’auteur donne ensuite des noms d’oasis].

Des sources et des filets d’une eau toujours limpide y favorisent la culture des céréales, des fruits et des légumes. Dans toutes les Oasis, les longs stipes des cocotiers, des doums et des avoîras, couronnés par de vastes parasols, y versent une ombre salutaire sur les troupeaux, qui paissent une herbe fine et succulente ; là l’industrie rurale a rencontré un sol sans cesse prêt à la payer de ses sueurs ; aussi est-elle parvenue à fixer une inépuisable fertilité. (…)

Les Oasis occidentales sont encore sous la dépendance des états maroquins. Toutes offrent aux caravanes qui traversent, chaque année, le grand désert des stations agréables, des lieux de rafraîchissement, autant d’Élysées propres à soutenir leur courage, et à leur rendre l’entreprise moins pénible. L’air qu’on y respire est frais, embaumé des parfums les plus suaves, et entretenu par les protées aux feuilles argentées et autres arbres descendant des montagnes du troisième ordre qui les abritent contre la marche dévastatrice du Sémoun.

[Après un exposé de l’extension, indue à ses yeux, du mot “oasis” à des paysages français, l’auteur termine par :]

Quand on visite une Oasis quelconque, il est impossible de nier les miracles de l’industrie, et de ne pas charger d’imprécations les pays qui croupissent dans la misère, et qui, habitués aux horreurs de l’esclavage, ne font rien pour en sortir. Qu’ils recueillent la punition de leur paresse, c’est justice : on ne peut plaindre l’homme assez lâche pour redouter le travail ; la pitié n’a d’oreille que pour l’infirme et la faiblesse.

Je sais qu’il existe des Oasis au sein des steppes immenses de l’Asie et de l’Amérique ; mais leurs noms et leurs productions ne nous sont point assez connus pour oser en faire mention ici."


Le Jardinier
détail de la gravure « Le Jardinier » (Description de l’Égypte). Vol. 8 : État Moderne II, p ; 102, Planche XXIX, Collections, Art et métiers.