Une communication gestuelle [men hena] au Yémen
Dr Vincent Battesti
pour la revue Chroniques yéménites
, du Cefas (ex-CFEY), 2001, Sanaa, Yémen

Nous demandons notre chemin aux passants, ce qui provoque immanquablement des attroupements de gens tous aussi charmants et serviables les uns que les autres ; chacun y va de son itinéraire, le débat s'engage pour savoir quel chemin est le plus court, le problème étant qu’ici personne ne connaît vraiment le nom des rues. Et puis évidemment les explications dans un mélange d'arabe et de gestuelle compliquée ne sont pas des plus faciles à comprendre...  (Extrait d’un journal de voyage en Syrie, trouvé sur le site de M. Emmanuel Besnier).

Des gestes d’ici et de là-bas : l’universalité.

Les gestes sont la partie innocente et cruelle de la communication. Le recours aux mains semble curieusement le meilleur des palliatifs quand on ne maîtrise pas la langue de l’autre. Cet élan naturel vers le geste semble accorder à ce type de communication une origine ou un stade plus primaire encore que le « petit nègre » : un pis-aller d’expression, mais teinté d’universalisme. On s’y engage donc innocemment. Ce qui permet cette première erreur est l’idée qu’à outils identiques (un même alphabet gestuel universel), les mots ne manqueront pas de conserver les mêmes sens en traversant les cultures.  Les premiers éthologues ne pensaient-ils pas que l’on avait à faire là à un proto-langage humain ? La cruelle erreur est que cette communication est humaine et consciente, c’est-à-dire indéniablement ancrée dans une culture. Edward T. Hall (1971 p. 13) dira même que « la communication constitue le fondement de la culture, davantage, celui de la vie même. » Le langage, verbal ou gestuel, est plus qu’un simple moyen d’expression de la pensée : il est l’élément majeur dans la formation de la pensée. La perception de monde qui nous entoure est en quelque sorte programmée par la langue qui le parle. Mais les cultures varient. Les mots de ce langage (les combinaisons de gestes élémentaires, pour ce qui nous concerne) se ressemblent, mais alors les faux-amis pullulent. Pour citer encore une fois la position de Hall (p. 15), on peut dire que les individus appartenant à des cultures différentes non seulement parlent souvent des langues différentes, mais, ce qui est sans doute plus important, habitent des mondes sensoriels ou perceptifs différents [1] .

On comprend cependant la méprise qui conduit à l’usage spontané de la communication gestuelle en espérant l’universalisme : de nombreux éthologues avaient montré que la mimique émotionnelle (rire, tristesse, peur, surprise) était la même dans toutes les ethnies, toutes les cultures, et s’accompagnait des mêmes modifications végétatives (fréquence du pouls, rougeur ou pâleur du visage, sudation…). On touche là à des universaux tempérés légèrement en amplitude de « sympathie » : « les individus décodent généralement mieux les expressions faciales émotionnelles des membres de leur propre groupe ethnique » (Herrera, Bourgeois, Cheung, Hess, 1998), on mesure mieux l’intensité de ces mimiques émotionnelles quand elles émanent de sujets issus de sa culture. Mais à l’opposé, les « rituels d’interaction » (que Erving Goffman a bien décrits par exemple), les gestes auto-signifiants sont propres à une culture déterminée de même que la distance interpersonnelle bien étudiée par Edward T. Hall.

La communication gestuelle est définie ici un peu différemment de la communication non verbale, un peu vaste pour la traiter convenablement ici. La communication est la possibilité, pour un sujet, de transmettre une information à un autre sujet. La communication non verbale inclurait tous les procès de communications qui ne s’expriment pas par le verbe. On sait aujourd’hui qu’ils sont nombreux : au-delà de l’univers sonore des intonations, des onomatopées, des soupirs, des rires et des cris, on peut penser avec justesse aux univers des odeurs (corporelles, phérormones), des expressions corporelles maîtrisées toujours que partiellement (grimaces, trépignement, brillance des yeux), des mises, tenues et maquillages, des postures, bref une foule de signaux informatifs (stimuli) et jamais objectivés dans leur ensemble tant par les émetteurs que par les récepteurs de ces messages.

La gestuelle arabe dans la communication non verbale : une unité hypothétique.

Cet article n’envisage que d’aborder les communications gestuelles, c’est-à-dire d’aborder ce vaste ensemble de gestes intentionnellement exprimés en vue d’une communication : ces expressions viennent accompagner (ou appuyer) une communication verbale ou s’en affranchissent et sont signifiantes par elles-mêmes (gestes auto-signifiants). Comme le formulerait Goffman, ce sont des gestes ont lieu lors d’une présence conjointe et en vertu de cette présence-conjointe, cela volontairement. Je laisse pour l’instant aussi de côté l’ensemble des gestes d’auto-contact (comme le geste de se frotter les mains qui est d’abord un geste qui cherche inconsciemment à rassurer le sujet). Le travail proposé n’est qu’une entrée en matière, et n’a pas encore d’ambition d’un véritable répertoire. Il rassemble un certain nombre de données recueillies scrupuleusement au Yémen (mais sans être exhaustif), en particulier à Taez et Sanaa. À ma connaissance, très peu de travaux scientifiques ont été consacrés en anthropologie à l’étude de cette communication gestuelle, et en particulier sur le monde arabo-musulman. Faut-il espérer une homogénéité de la communication gestuelle à travers des pays partageant un même fond arabophone ? Il sera très difficile de trancher cette question délicate, mais déjà il est possible de noter des corrélations entre gestes du Yémen et gestes du Maroc (nous y reviendrons plus loin). Pour ce travail, je m’appuie en effet sur une contribution au colloque international Le corps et l’image de l’autre (Marrakech, 1989) de J.-F. Clément : la gestuelle marocaine dans la communication non verbale.  Pour aller vite, globalement, je m’inscris dans la démarche intellectuelle de cet auteur et j’y renvoie le lecteur désireux de plus amples informations, en particulier sur les diverses tentatives d’élaborer une typologie des gestuelles. Disons que le propos ici est d’abord d’établir une première ébauche pour le Yémen d’un vaste corpus de gestes signifiants (ou auto-signifiants) qui serait à construire. La richesse de l’expression gestuelle au Yémen n’a jamais été exposée, au contraire des études linguistiques sur les divers dialectes yéménites. On peut pourtant présenter des gestuelles comme des compléments, en quelque sorte visuels, à la communication orale. Pour pousser plus loin l’idée, il peut même sembler curieux que dans l’étude des spécificités des communications yéménites, on ait jusqu’aujourd’hui toujours amputé sa dimension corporelle. Pourtant, ces gestuelles sont très employées dans la vie quotidienne yéménite, et beaucoup de ces gestes expriment un sens très fort pour ses encodeurs comme ses décodeurs. Ce qui est abordé ici à travers les exemples de Taez et Sanaa est aussi une diversité géographique de cette expression gestuelle. Mais je n’en donnerai pas encore le plein effet, car Sanaa et Taez, à l’échelle du Yémen, sont encore dans la même zone montagneuse de l’Ouest yéménite. Je m’attends à une différenciation beaucoup plus forte entre l’Est (montagnes) et l’Ouest du pays (Hadramaout), entre les zones montagneuses et les zones côtières (retrouve-t-on à Aden l’influence indienne ?), sans même évoquer le cas insulaire de Socotra qui semble prodigieux.

S’il fallait être plus ambitieux encore, il faudrait envisager un véritable travail comparatif des communications gestuelles à travers l’ensemble du monde arabo-musulman. Ce serait une vaste cartographie des gestes, de leurs étendues, leurs diffusions, leurs caractères singuliers… Car il y a fort à parier qu’une certaine unité peut se dégager dans ce domaine entre les diverses régions arabo-musulmanes, en dépit de la variété des cultures locales, des particularismes, des nationalités, des traditions locales… Une certaine tradition orientaliste nous a enseigné les sociétés arabes comme des sociétés monistes où règne le primat de la religion musulmane comme paradigme structurant et déterministe. Il est vrai que de nombreux versets coraniques ont trait au culte, au comportement à tenir en telle ou telle situation. En outre, le modèle prophétique a été décisif dans l’élaboration du code régissant ce qu’on peut appeler le « corps islamique ». Les écrits du fiqh ont codifié dans le moindre détail l’usage de ce corps : la manière de se tenir, de marcher, de parler, de manger, de faire ses ablutions, de prier, de jeûner, etc. Une codification référant au sacral s’est étendue ainsi du domaine cultuel proprement dit à la sphère des relations sociales et même de la vie la plus intime du corps, celle de la sexualité. Cette véritable « grammaire » du corps s’appuie en fin de compte sur une métaphysique. En se pliant à ces contraintes, le « corps islamique » terrestre éphémère, périssable, se voit promis à la résurrection glorieuse, paradisiaque (Leftah M., 2000). Nous n’avons pas à verser pour autant dans une telle approche orientaliste : ces gestes ont-ils à voir avec la religion ? Il est indéniable que cette qualité de la gestuelle soit un patrimoine commun de l’imaginaire du monde arabo-musulman. Il ne s’agit plus là tt à fait de religion : dès l’enfance à l’école coranique, l’imaginaire de la gestuelle peut se nourrir des indications ou des obligations comportementales prescrites par le livre saint. Il serait difficile toutefois de leur accorder l’explication des systèmes gestuels ou des proxémiques relevées chez les Arabo-musulmans. C’est un apport du culturalisme, quand on peut dire que toute la gestuelle et le rapport au corps d’autrui chez l’enfant sont progressivement façonnés selon des règles et des prohibitions implicites ou explicites, au point que, devenus adultes, hommes et femmes se conforment à ce pattern sans même en être conscients (Abélès, 1999).

Le corpus de la gestuelle yéménite dans la communication non verbale

Décrire les gestes (critères subliminaux) : rapidité de l’exécution, agressivité (verticalité), apaisement (horizontalité), ouverture et fermeture, cœur (implication  personnelle, sincérité),

Introduction technique : les deux terrains abordés dans cette recension des gestuelles au Yémen sont les villes de Taez surtout et de Sanaa. Sanaa est la capitale du pays, située plus au nord que Taez. Taez est l’ancienne capitale du Yémen sous l’imanat. Implicitement, à moins d’une mention contraire (les différences sont soulignées), les données présentées sont validées sur ces deux terrains. Un commentaire, une vidéo ou une image suivie d’un [T] ou d’un [S] signifie qu’ils proviennent respectivement de Taez et Sanaa. Par « geste masculin » ou « geste féminin » dans les commentaires, j’entends « geste pratiqué par les hommes » et « geste pratiqué par les femmes ». En cas de polysémie d’une gestuelle, le cas mineur est présenté en note du cas majeur.

Considérations générales : la communication non-verbale gestuelle intentionnelle au Yémen ne met pas à contribution l’ensemble du corps. Ou plus exactement, il existe une grande asymétrie dans l’usage des parties du corps : on retrouvera presque toujours la main comme élément actif. Beaucoup de gestuelles se résument à une posture ou un mouvement de la main seule ; d’autres asservissent une autre partie du corps. Par exemple, la main va désigner la tempe, ou un doigt va se poser sous l’œil. Il arrive toutefois que des gestes n’aient pas recourt à la main (par exemple lorsque l’on tire la langue). Il n’en reste pas moins ce statut très particulier des mains qui ne sont pas qu’une simple partie du corps qui gesticule ; elles sont souvent l’expression même des émotions, des sentiments, elles donnent une forme aux pensées. Bien plus qu’une terminaison (très) nerveuse du bras, elles sont l’organe de contact, de préhension du monde, mais aussi de défense, comme nous le verrons dans les gestes yéménites (mais que l’on pense aussi bien sûr au khamsa qui protège).

Nous sommes ici au Yémen. Les populations de la zone méditerranéenne sont reconnues à la fois pour la facilité de contact physique entre individus et pour leur propension à « parler avec les mains », une expressivité souvent mise en contraste des austères réserves nord-européennes. Il va sans dire que le Yémen se rapproche de beaucoup du cas méditerranéen. Les modes de communications non verbales au Yémen cependant laissent voir les spécificités de l’histoire propre du pays ; la plus récente et la plus pertinente à cet égard est la pénétration surtout en zone urbaine du rigorisme religieux exacerbant la démarcation habituelle entre les genres. Même pour un enquêteur d’origine extra-locale (non yéménite, européen), il est difficile de pénétrer les intimités domestiques, en particulier féminines. Il en résulte que les gestuelles décrites ici sont celles possiblement observées dans la sphère publique. Hors de la sphère domestique, les femmes circulent peu, communiquent peu, elles ne font « que passer » ; ce sont les hommes qui « habitent » les espaces publics. Outre cette retenue (voire effacement) du genre féminin qui se développe comme une norme en zone urbaine, je me demandais si le port récent par les femmes (une quinzaine ou vingtaine d’années) du voile noir couvrant entièrement le corps (en général, il n’apparaît de peau que la mince fente des yeux) pouvait gêner cette communication [2] . Je crois qu’effectivement, il y a là une vérité technique qui empêche l’efficacité des techniques de communication non verbale, car les gestuelles deviennent pleinement compréhensibles aussi grâce à leur contexte de mimiques, de grimaces… particulièrement dissimulées ici sous le voile. Un discours souvent tenu, tant par les femmes que par les hommes, serait que les femmes pratiqueraient moins de communications gestuelles. Ou encore, la gestuelle des femmes est limitée dehors (lieux publics) en présence des hommes pour une question dite « de respect ». Les contacts physiques sont proscrits (sauf rares exceptions) entre un homme et une femme. Entre un même sexe, a contrario, ils sont très fréquents. 

Choix du classement : aucun des classements des gestuelles en communications non verbales ne m’a paru plus pertinent à l’usage. Les observations sont donc classées globalement par thèmes d’activités, regroupés grandes fonctions :

Salutations

Salutation collectives

 

Salutation interindividuelles

Positions amicales

Amitiés

 

Amour

 

Inimitiés

 

Rupture

Se protéger

Mauvais œil

 

Protection et justice

Attaquer

Bagarre

 

Agacement

 

Menaces

 

Défi

 

Énervement

 

Insultes

 

Taquiner

Sa relation à l’autre

Jurer

 

Assurer

 

Promettre

 

Revanche

 

Désapprouver

 

Reproche

 

Mépriser

 

Accueillir

 

Mensonge

 

Mentir

 

Narguer

 

Exprimer sa liberté

 

Exprimer la ruse

 

Exprimer l’intelligence

 

Exprimer la puanteur

 

Mérite

 

Se moquer

 

Consoler

 

Complicité

 

Réconcilier

 

Exprimer la folie

Demander et répondre

Quoi ?

 

Questionner

 

Une pause

 

L’heure

 

Oui

 

Non

 

Ça dépend

 

Je ne sais pas

 

Jamais

 

Oublier

 

Attendre

 

Faire vite

 

Répondre

 

Remercier

Les sentiments

Fâché

 

Exaspéré

 

Étouffement

 

Défiance

 

Honte

 

Tristesse

 

Impuissance

 

Catastrophe

 

Peur

 

Solidarité

Les fonctions biologiques

Manger

 

Faim

 

Boire

 

Soif

 

Qat

 

Relation sexuelle

 

Dormir

 

Mourir

Évaluer

Bien, beau

 

Sale

 

Petit

 

Mince, faible

 

Grand

 

Fort

 

Un peu

 

Beaucoup

 

Rien

 

Intensité

Compter

Énumérer

 

Unités

 

Dizaines

Questions d’argent

Avoir ou gagner de l’argent

 

Cher

 

Avare

 

Demander de l’argent

 

Refuser de donner

Désigner

Une personne

 

Moi

 

Appeler quelqu’un

 

Un endroit

 

Un temps passé

 

Un temps présent

 

Un temps futur

 

Un document

 

Un livre

 

Un téléphone

Gestes typiquement religieux

Dieu

 

Prier

 

Un religieux

Se déplacer

Arrêter un dabab

 

Directions habituelles de dabab


- Salutations :

Salutations collectives – Dans une assemblée : quand on entre dans une pièce, on salue tout le monde dans le strict ordre de sa droite à sa gauche, quelque importante soit une personne au milieu. On marque un temps plus long avec les personnalités ou on les embrasse. Si on ne veut pas saluer tout le monde, on ne salue physiquement personne, sauf si on dit « Je salue tout le monde sauf … » le sheikh par exemple. « As-salâm tahïa mâ°dâ ash-shaïkh ». On peut saluer plusieurs personnes ou une seule rapidement d’un signe de tête, la tête se baissant plus lentement pour une personne importante.

Salutations interindividuelles – Un salut rapide d’une connaissance : du bras ballant droit, l’avant-bras se lève lentement d’à peine plus de 90° vers le haut, la main ouverte continue légèrement le mouvement et l’ensemble retombe vite. Qu’un homme le fasse à une femme suggèrerait une complicité qui serait interprétée comme la preuve d’une liaison étroite (donc blâmable). Pour saluer mais aussi pour dire au revoir, on peut faire couramment un salut militaire : main droite ouverte et doigts serrés s’écartent du visage de manière sèche après avoir touché le front sur sa partie droite. C’est une salutation en usage qu’entre hommes. Si l’on veut être un peu plus formel, on serre la main (shake-hand). Si on connaît la personne, et/ ou si l’on veut marquer le respect a lieu le shake-hand avec baiser de la main de l’autre à tour de rôle (trois ou quatre fois chacun). Voir vidéo [T] « Bonjour respectueux hommes1 » et « Bonjour respectueux hommes2 ». Le baiser peut être réel, c’est le cas pour une personne qui va saluer une personne plus vieille, ou fictive (donner en l’air sans se poser réellement sur la peau) entre deux personnes du même âge.

Plus amical ou familial : le serrement de main avec bises sur la joue (les joues se touchent et le baiser se fait en l’air bruyamment). Uniquement entre personnes qui se connaissent. Voir vidéo [T] « Bonjour amical hommes ». La main libre peut se poser sur l’épaule de l’autre. Les bises se font d’un côté puis de l’autre. Celui qui tend sa joue gauche reçoit et l’autre donne. Selon la position sociale des acteurs, par exemple une bise peut se faire d’un côté et trois de l’autre ensuite. Plus amical encore, les mains qui se rencontrent pour se serrer peuvent claquer signifiant la complicité. Voir vidéo [T] « Bonjour complice hommes ». Enfin, il y a l’accolade qui a lieu lors de retrouvailles, lorsque la dernière entrevue remonte à longtemps, entre de bons amis ou de la famille. On tape alors deux ou trois fois dans le dos de l’autre des deux mains. Voir vidéo [T] « Accolade hommes ».
Dans tous ces cas de salutations, la main droite peut se porter au cœur pour signifier le respect (de même pour insister dans le remerciement). Il existe des variations extrêmement importantes, ou plutôt un ensemble de gradations. Deux personnes par exemple peuvent se serrer la main de façon formelle, mais l’une d’elles seulement va baiser son poing fermé dans la région du pouce, marquant la différence de statut entre eux deux et son respect pour l’autre. On peut aussi se serrer les mains formellement et entendre l’un des deux faire le bruit du baiser sans le porter.

Il y a aussi le cas particulier d’une salutation à une personnalité religieuse (un sheikh). Deux personnes religieuses entre elles ou l’une avec une personne laïque vont s’embraser sur les épaules au lieu des joues, et tous les deux le font, par modestie de la part du religieux (ils sont « frères »). Pour les sheikh de tribu, il n’y a pas cette marque de respect supplémentaire qui est portée.

Entre femmes – Les gestuelles sont sensiblement identiques qu’avec les hommes entre eux lorsque l’on ne connaît pas la personne, ou qu’il s’agit d’une personne civile trop importante, on se serre la main. Le shake-hand. Voir vidéo [T] « Bonjour amical femmes ». Si les deux personnes se connaissent, elles se font la bise en se serrant la main. Voir vidéo [T] « Bonjour amical femmes ». Deux bises peuvent suffire. Dans la campagne autour de Taez, les femmes peuvent plus facilement faire des bises à répétition du même type que dans la vidéo [T] « Bonjour amical hommes ». J’ai entendu dire [S] que « les femmes [entre elles] sont plus hypocrites, car elles se font plus de bises » que les hommes, en fait on les accuserait de moins marquer le type de relation sociale.
Entre hommes et femmes : les contacts physiques sont proscrits, sauf s’il existe une relation de parenté très rapprochée. Le mari et la femme peuvent se faire la bise (en se serrant les mains) s’ils ne se sont pas vus depuis plusieurs jours (jamais sur la bouche). Sinon, plus quotidiennement un hochement de tête sert de salutation. Un homme (ou un enfant mâle) peut faire la bise à sa mère ou sa grand-mère sur le front puis presque sur le haut du crâne, et en particulier le vendredi (en revenant de la mosquée).

- Positions amicales :

Amitiés : en position assise, on peut laisser sa main sur la cuisse de l’autre. Deux hommes se tiennent la main (station immobile, n’importe quelle main ; en marchant, main droite de l’un avec la main gauche adjacente de l’autre). Marcher main dans la main entre un homme et une femme signifie qu’il s’agit du mari et de la femme (relativement rare), entre un adulte et un enfant, qu’il y a une filiation. Voir aussi « Solidarité ».

Amitiés 2 : deux index des deux mains (d’une même personne) qui se crochètent signifient une amitié solide, une fraternité entre deux personnes. Cela peut accompagner une phrase du genre « Ils sont comme ça ! ».

Amitiés 3 : idem sauf que les deux mains sont jointes avec les doigts qui se croisent.

Amitiés 4 : les deux index joints des deux mains (d’une même personne) avec un léger mouvement avant et arrière signifient une fraternité entre deux personnes de même sexe. Peut s’utiliser pour dire que deux pays sont frères, proches… Peut signifier plus généralement « ensemble ».

Amour : idem que Amitiés 4, mais il s’agit de deux personnes de sexes différents ; cela suggère une relation amoureuse entre elles.

Amour 2 : un amour déclaré par le sujet, la personne porte sa main au cœur. Voir vidéo [S] « Amour ».
Inimités : deux index des deux mains (d’une même personne) qui se croisent en croix signifient une inimitié entre deux personnes (ce sont des ennemis).

Inimitiés 2 : deux auriculaires des deux mains (d’une même personne) qui se crochètent signifient une inimitié entre deux personnes à Taez. À Sanaa, ce sont les pouces qui sont utilisés. Deux personnes différentes peuvent le faire (avec la main droite) signifiant la même chose sinon que ce sont ces personnes-ci qui sont fâchées entre elles ; mais il s’agit là d’un registre enfantin : « on se quitte, on est fâché ».

Amitié ou inimitié : de registre enfantin, une personne peut demander à une autre de « choisir entre ceci ou cela » : poing droit fermé paume vers soi, avec l’index et l’auriculaire levés, signifiant un choix respectivement entre l’amitié ou l’inimitié.

Rupture : c’est un geste enfantin [T] où le poing fermé, la paume vers le ciel, a l’auriculaire et le pouce tendu ; l’enfant crache ou embrasse l’auriculaire qui part vite vers le sol. Cela signifie une rupture forte entre le sujet et une autre personne.

- Se protéger :

Mauvais œil : pas de gestes à Taez (le « khamsa » n’est pas connu). On dit des incantations comme dix mashallah de suite. À Sanaa, au cours d’une discussion, on peut discrètement présenter un khamsa, c’est-à-dire la paume de la main vers l’extérieur, les cinq doigts écartés.

Chercher protection et justice : jeter (en entrant dans une pièce) son shâl sur les genoux d’une personne importante : je suis fautif, je demande votre protection et j’accepte par avance votre jugement (votre justice). On cherche refuge et l’on désigne l’arbitre. Cela autant en ville qu’en campagne.

Attaquer :

Bagarre : les deux poings fermés viennent se rencontrer (se cogner) l’un contre l’autre (l’affrontement) devant la poitrine. Ce geste pourrait aussi mimer un accident de voiture, un choc [S]…

Agacement : aussi une menace de frappe plus tard. on le fait surtout envers les enfants. L’index droit écrase l’œil droit fortement vers l’intérieur, accompagné d’une grimace, d’un rictus sur le côté droit. Plus on enfonce l’index dans son œil, plus on menace de frapper fort.

Menacer : voir le « »?ÍÊÍ » (« bi-°aïny ») de « revanche ».

Menacer 2 : index levé, mouvement de la main de haut en bas, dirigé vers la personne que l’on menace. Geste très fort (plus que « menace »). Se fait aussi envers les enfants. Voir vidéo [T] « Menace attention ».

Menace 3 : mime de l’étranglement ; le pouce et l’index droits serre une ou deux seconde la glotte. Voir vidéo [T] « Menace d’étranglement ». On hésite avec l’étouffement en fait. Une version [S] prend le cou plus franchement dans la main. Il sert aussi à exprimer le « ras-le-bol » (d’une personne, d’une chose). Voir vidéo [S] « Étrangler ».

Menace 4 : mime de l’égorgement ; l’index ou tout l’avant bras passe sur la gorge, une seule fois. Voir vidéo [T] « Menace d'égorgement n°2 ». C’est aussi un geste général pour parler d’un égorgement (sacrifice d’un animal) ou d’une exécution (d’un être humain).

Menace 5 : le pouce et l’index se touchent aux extrémités (cela ressemble au « nul » français) [S] ; cela signifie « si tu fais ça… » et c’est accompagné du (°arr) (voir « Défiance »). Voir vidéo [S] « Menace (harr) 2 ».

Défi : chez des jeunes garçons (ou parfois de jeunes adultes), il n’est pas rare que par défi qui est souvent un jeu, des personnes d’empoignent fortement. Un rapport de force, très physique, est souvent joué.

Énervement : une forme de menace d’aller plus loin : le bras droit replié vers l’épaule se déplie vers l’avant (paume vers le ciel) ; le geste peut se répéter. Voir vidéo [T] « Menace d'énervement ». Geste exécuté avec la formule (par exemple) de « ?’Ê„Â÷—»¨†‰ÍÃ?‰„†«‰‰Á ». (« Dieu t’enverra dans un lieu maudit, et tu es sourd ! »)

Répondre à la menace : cela marque le peu d’intérêt ou de crédit qu’on accorde à la menace. Ventilation de la main : la main droite balaye l’air vers la droite devant la partie droite du visage. On peut accompagner cela de « ?Ë“ » (« Toz ! »). Voir vidéo [T] « Réponse à la menace n°1 » et « Réponse à la menace n°2 ».

Insulte : les deux bras se détendent en même temps vers l’avant, dirigées vers la personne qu’on insulte, mains ouvertes à plat et se faisant face. On lui envoie en bloc toutes les insultes possibles. Cela peut-être encore considéré comme une forme de menace en même temps.

Insulte 2 : le geste ressemble au « bras d’honneur », mais le bras reste dans son entier tendu et vient frapper en remontant la main gauche au niveau de son coude (intérieur) ou plus bas. Se fait entre hommes (comme toutes les insultes), mais le sens n’est pas excessivement fort. On peut imaginer une situation du style : « Peux-tu me donner ceci ? » et à l’autre de répondre (en geste) par méchanceté ou malice « prend ça ! », c’est-à-dire « mon sexe » hypertrophié comme « la bite de l’âne ».

Insulte 3 : le doigté, c’est-à-dire l’avant-bras qui se relève légèrement avec la paume dirigée vers le ciel. Tous les doigts restent (dans la mesure du possible) allongés sauf le majeur qui est relevé vers le ciel. Le majeur mime bien sûr le sexe masculin. C’est donc un mime de sodomie. Voir vidéo [T] « Insulte doigté n°1 ». Le geste peut-être assez discret et fait à l’insu de la personne à qui il s’adresse.

Insulte 4 : Replier l’avant-bras sur le bras en fermant le poing qui va toucher l’épaule. Le coude est relevé jusqu’à l’horizontal. Le bras en son entier mime bien sûr le sexe masculin. C’est donc un mime de sodomie.

Insulte 5 : le pouce et l’index se touchent aux extrémités (cela ressemble au « nul » français). La personne visée est traitée d’homosexuel. Cela correspond à l’interjection « pédé ! » [T]. Voir vidéo [T] « Insulte pédé ». Voir « Menace 5 ».

Insulte 6 : de sens identique à « Insulte 5 », mais avec une expression plus forte, les quatre doigts de la main gauche sont accolés et le bout de l’index touche le bout du pouce. Cette main est présentée devant soi assez bas et la main droite vient frapper à plat de la paume l’orifice suggéré de la main gauche. Cela suggère la sodomie, ou que l’homme visé est homosexuel. Si la personne visée est une femme, c’est qu’on la traite de prostituée, de catin. Voir vidéo [T] « Insulte sodomie1 ».

Insulte 7 : insulte du registre de la sodomie, mais plutôt entre amis. La main droite ouverte et tendue désigne d’abord la personne visée et ensuite la main désigne son propre sexe. Le geste est explicite, mais il peut être souligné d’un « tra » : on désigne en fait d’abord une personne qu’on invite à monter sur son sexe. Voir vidéo [T] « Insulte sodomie2 ».

Insulte 8 : exactement sur le même modèle que « Insulte 7 », cette main peut aussi seulement trancher l’air devant soi lorsque l’insulte de sodomie est destinée à une personne qui est éloignée, ou seulement désigner son sexe quand la personne est proche.

Insulte 9 : pour traiter d’homosexuel (geste masculin), on peut se moquer en ayant l’avant-bras qui se relève et la main qui pend extrêmement molle (au contraire, la fermeté ou la vigueur est associée à la virilité).

Taquiner : ce n’est plus vraiment une attaque, car c’est un geste qui peut être affectueux. Le geste est le même que « Insulte 3 : le doigté », mais la main est à la verticale de telle manière que le majeur est dirigé vers la personne visée. Cela peut être à distance ou avec toucher, alors le majeur est glissé sur le visage de l’autre. On peut aussi accompagner le geste de : « ????? » (shallûk, que les jnun t’emportent), mais moins littéralement « tu es idiot, tu dis n’importe quoi ». Une mère peut le faire à son fils. À Taez comme à Sanaa, il s’agit d’un geste d’usage féminin. Au cas où il serait utilisé par les hommes, et en particulier à Sanaa, cela serait considéré comme une grave insulte.

- Sa relation à l’autre :

Jurer : deux personnes en opposition peuvent donner leur jambya à une personne importante (sheikh, …). Cela peut être autre chose que la jambya, en général quelque chose de valeur, comme une kalachnikov, de l’argent, une voiture, une maison, une terre. Les deux personnes doivent en tout cas donner pour la même valeur. La personnalité gardera l’objet du menteur. Cela autant en ville qu’en campagne

Jurer 2 : on porte la main sur le cœur.

Jurer 3 : on serre la main (sans la secouer) de l’arbitre ou de l’autre partie en disant « Je jure devant Dieu… » ou « par la vie de mes enfants ».

Jurer 4 : par Dieu ! : index levé, la paume orientée vers l’extérieur.

Assurer : pour affermir ses propos, le poing vient frapper la table.

Promettre : l’index droit se pose sous l’œil droit puis sous l’œil gauche, en ajoutant parfois « °aïny hadhi kabla hadhi » (cet œil avant celui-ci [que je te donnerai plutôt que ne pas respecter cette promesse]). Il signifie « je suis à votre service, je vais faire le service que vous me demander » (en prononçant « ?????» « bi-°aïny »). À Sanaa, on dit plutôt « ?? ????» (« min °aïny »). Mais il y a une grande ambiguïté entre promettre et menacer, car on peut promettre de rendre un service, mais aussi de se venger (cela peut-être une menace de la mère à l’enfant). Voir vidéo [S] « Promettre min °ainy ». Il s’agit surtout d’un service rendu.

Promettre 2 : l’index trace une ligne de haut en bas sur la joue droite sous l’œil. Cette fois, c’est une promesse, donc une obligation.

Promettre 3 : la main droite sur le cœur, « d’accord c’est promis ».
Aider : « si tu as des problèmes, je vais t’aider » signifié par une tape de sa main droite sur le cou [S]. Voir « Fâché ».

Revanche : même geste que « promettre », « ?????» (« bi-°aïny »), mais en général (pas toujours) non-symétrique : l’index droit se pose sous l’œil droit. Il signifie quand on est en colère : « je me souviendrai de cela, … et l’on verra plus tard ! Tu vas voir ! ». À Sanaa, on dit plutôt « ?? ????» (« min °aïny »). Voir vidéos [S] « Menacer » et « Menacer min °ainy ».

Désapprouver : Le menton est pincé entre le milieu de l’index et le pouce, l’auriculaire légèrement relevé. On signifie à une personne qu’il devrait avoir honte, le « °aïb » ou alors « tu me déçois ». Voir vidéos [T] « Reproche de mensonge n°2 » et [S] « Honte (barbe) ».

Désapprouver 2 : caresse de la barbe, ou simulacre. « °aïb », la honte pour l’autre. En cas de mensonge ou de mauvais comportement dans une situation. Voir vidéo [T] « Reproche de mensonge n°1 ».

Désapprouver 3 : l’index trace une ligne de haut en bas sur la joue droite sous l’œil : « pourquoi n’as-tu pas tenu ta promesse ? »

Mépriser : on crache au sol. C’est un geste fort pour exprimer son mépris pour une chose ou si l’on discute avec quelqu’un, et cela lui est adressé, cela signifie qu’il ne mérite pas qu’on lui parle, c’est un salaud, il ne mérite rien. Geste pratiqué uniquement par les hommes (on crache dehors et le port du voile sur le visage chez les femmes limite de toute façon l’usage !). Normalement, on crache à droite. [T]

Accueillir et estimer : frappe à plat de la main droite sur le cœur (main laissée ou frappe deux fois) : vous êtes les bienvenus, vous restez dans mon cœur.

Mensonge ou sans valeur : paume vers soi, les quatre doigts brosse la barbe à l’envers au niveau de la bouche en se dirigeant vers la personne visée : « tu dis n’importe quoi, tu mens », ou « tu ne vaux rien ». Voir vidéo [S] « Mensonge ».

Mensonge ou sans valeur 2 : adressé à la personne qu’on pense mentir ou dire n’importe quoi pour lui montrer qu’on n’est pas dupe du mensonge : on tire la langue (faiblement) entre les dents vers la personne visée, avec un geste du menton vers le haut [S]. Voir vidéo [S] « N’importe quoi ».

Mentir : soit adressé à la personne qu’on pense mentir ou à une personne tierce complice à qui l’on veut montrer qu’on n’est pas dupe du mensonge de l’autre. Clin d’œil à droite marqué avec un rictus du même côté laissant apparaître les dents à la commissure des lèvres. Le geste est accompagné d’un bruit de sussions. C’est plutôt un geste masculin.

Narguer : le poing droit fermé, avec le pouce levé comme le signe « OK », vient se loger dans la paume de la main gauche ouverte. Le poing est alors animé d’un mouvement circulaire comme pour moudre. Le poing peut venir frapper ensuite la paume. Voir vidéo [T] « Narguer ». ce geste est utilisé pour narguer une autre personne. C’est un geste féminin. Si par exemple deux filles sont en compétition pour un garçon, celle qui gagne fera le geste à l’autre, ou si l’on a fait une action qui nous a été interdite par quelqu’un, pour l’énerver ou le narguer on peut également faire ce geste. Geste typiquement féminin à Sanaa également.

Narguer 2 : tirer la langue entre les dents vers la personne que l’on veut narguer. C’est un geste fait à destination des enfants, des enfants entre eux et des femmes entre elles.

Exprimer sa liberté : l’index droit vient se poser sur la tempe droite, le coude assez haut, cela signifie surtout chez les femmes « je suis libre, je fais ce que je veux ». Chez les hommes, il peut être utilisé pour dire à un autre « faites comme bon vous semble ». [T]

Exprimer la ruse : pour dire d’une personne qu’il est rusé, qu’il est malin, on frotte l’index sur le pouce et les autres doigts repliés comme pour signifier l’argent, mais ici la paume de la main est tournée vers le sol [S].

Exprimer l’intelligence : les deux mains ouvertes se lèvent au niveau du cerveau, surestimant le volume crânien. On signifie ainsi (pour une personne) une grande intelligence, ou que cette personne réfléchit beaucoup.

Exprimer la puanteur : se boucher le nez entre le pouce et l’index signifie que ça sent mauvais.
Mérite : le poing droit est fermé et le pouce levé (signe « OK », et la main va de droite à gauche (deux allers-retours). C’est lorsque l’on estime qu’une personne mérite ce qu’elle a gagné [T].

Se moquer : pour se moquer d’une personne qui répète souvent le même discours. Le bras droit tendu le long du corps, poing fermé, l’avant-bras remonte seul un peu au-dessus du niveau de la ceinture et redescend avec force vers le sol. Cela signifie « en plus ! », c’est-à-dire « toujours la même chose ». Se fait souvent en fait à destination d’une tierce personne présente [T]. Il peut se faire aussi plus à l’horizontal [S] avec le même sens.

Consoler : embrasser un homme sur la joue en lui tenant la tête des deux mains : on veut lui faire refouler sa colère.

Complicité : un clin d’œil exprime la complicité entre le sujet et la personne visée. C’est entre homme que peut se faire ce geste. D’un homme en direction d’une femme, il s’agit alors de drague (de complicité aussi, mais qui alors ne peut être comprise que comme drague).

Complicité 2 : pour exprimer la complicité entre le sujet et la personne visée, on peut aussi se mordiller rapidement la lèvre inférieure avec les incisives supérieures.

Réconcilier : pour bloquer une dispute enclenchée, on peut demander aux protagonistes de se serrer la main en signe de réconciliation. En fait on se tient la main, plutôt qu’on ne la secoue.

Exprimer la folie : pour exprimer la folie dans l’absolu ou traiter de fou une personne, toute la main droite pivote au niveau de la tempe droite.

- Demander et répondre :

Demander « quoi ? » : la main qui pivote avec le pouce sorti et l’index très légèrement tendu (le pouce droit va ainsi plus ou moins du côté gauche ou du haut vers la droite) avec un mouvement du menton vers le haut. Voir vidéo [S] « Quoi 1 ». Ce geste a une allure de défi.

Demander « quoi ? » 2 : les épaules sont haussées, les deux mains ouvertes devant soi. Cela signifie « quoi, qu’est-ce qu’il y a ? je ne comprends pas ». Voir vidéo [S] « Quoi 2 ».

Questionner : pour signifier une question ou pour désigner la personne à qui s’adresse la question, il est courant de le désigner d’un mouvement de menton vers le haut.

Demander une pause : c’est geste occidental du registre du sport qui se répand chez les personnes se réclamant de la modernité [S] : la main gauche est ouverte, paume dirigée vers la droite et la main droite, paume dirigée vers le sol, viens buter dessus.

Demander l’heure : soit c’est la main droite ou soit c’est l’index et le majeur qui viennent frapper à plat le dessus du poignet gauche où normalement se porte le bracelet-montre.

Demander l’heure 2 : on remonte sa propre manche gauche avec la main droite, découvrant son poignet où normalement se porte le bracelet-montre.

Oui : pour acquiescer, on hoche de la tête. Bien qu’il ne s’agisse pas tout à fait d’un geste, mais n’est pas non plus du verbal, les enfants disent souvent « oui » en claquant seulement de la langue et soulignant parfois du menton qui remonte un peu.

Non : pour dire non ou nier, le plus courant est de remuer de droite à gauche l’index tendu ou bien les cinq doigts de la main à la fois (la paume est vers l’extérieur, devant soi). Plus le bras est tendu et l’agitation forte, plus la négation est forte.

Ça dépend : pour signifier un « ça dépend » comme réponse à une question, on hausse les épaules, tangue de la tête et on fait une moue de la bouche [S].

Je ne sais pas : pour signifier un « je ne sais pas » comme réponse à une question, on hausse des épaules.

Jamais : le pouce et l’auriculaire sortis, les autres doigts fermés, la paume vers le sol et le poing qui donne un coup bref vers l’extérieur signifie « jamais ! » [S]. Par exemple pour répondre à la question « tu prends du qât ? ».

Oublier : frappe de la paume de la main droite sur le front. Cela signifie « j’ai oublié » quelque chose ou que « je me rappelle » de quelque chose. Voir vidéo [T] « Chose oubliée ou rappelée ».

Attendre : même geste que « un peu » (voir vidéo [T] « Un peu ou attend »). C’est attendre « un peu » en fait. C’est peut-être même « attendre cinq minutes », car ce sont les cinq doigts que l’on présente.

Faire vite : même geste que « Cher », voir vidéo [T] « C’est cher » ou claquement des doigts devant soi, deux ou trois fois, ou claquement des mains deux ou trois fois devant soi.

Répondre aux salutations : « ça va très bien » signifié par un signe « OK », c’est-à-dire poing dressé et pouce levé. On peut rajouter : « ????» (bomb !) [T]. Geste entre jeunes gens masculins. Connotation moderne.

Répondre aux salutations 2 : « ça va moyen » signifié par la main ouverte, doigts relativement écartés, paume vers le bas et la main qui tangue de droite à gauche. On rajoutera « ????» (ya°ni…).

Remercier : le plus classique est une inclinaison (qui peut être répétée) de la tête vers l’avant. Voir vidéo [S] « Remercier ».

Remercier 2 : tout aussi répandu, et effectué de façon quasi-inconsciente, est le geste de la main droite portée au cœur, posée à plat. Dans les cas d’insistance, la main peut rester plusieurs secondes ainsi sur la poitrine.

- Les sentiments :

Fâché : quand on est très fâché, on peut claquer à plat de la main droite sur le cou (à gauche). [Sallah en-Nagd – T]. Voir « Aider ».

Exaspéré : pour signifier « j’en ai marre », le poing droit mal fermé vient se loger sous le menton légèrement sur la droite [T]. Geste masculin.

Exaspéré 2 : même geste que « Bien, beau » : l’index droit tape deux fois sur la narine droite avant de poursuivre son mouvement vers le bas ou un seul passage du doigt sans toujours toucher vraiment le nez. Cela s’accompagne parfois d’un « ÂʆÁÊ« ». Dans certains contextes à Sanaa, cela voudrait dire « j’en ai ras-le bol », ou « j’en ai jusque là ! ».

Étouffement : le pouce sous le menton reste posé sans bouger et avec insistance, dirigé vers l’extérieur ; il signifie « j’étouffe, je suis débordé ».

Étouffement 2 : avec le même sens d’étouffement, on mime un haut-le-cœur, les deux mains à plat sur la poitrine, la tête en avant la bouche entr’ouverte comme pour vomir.

Défiance : une ou deux tapes sur le lobe de l’oreille droite par derrière : ça ne me fait pas peur, je n’ai pas peur de vous, je te défie. On peut accompagner cela de « ???? » (°arr) qui, a priori, n’a aucun sens. Ce geste a peut-être un sens de menace chez les femmes. [S] À Sanaa, la tape sur le lobe de l’oreille signifie davantage « tu dis n’importe quoi ».

Défiance 2 : on peut dans la région de Barakani [T], tordre vers l’avant le haut de l’oreille, avec le sens de « je vous défie ». On accompagne le geste d’un double claquement de langue.

Honte : (que l’on ressent soi-même, donc à distinguer de « Désapprouver »), les deux mains viennent cacher le visage. Ce geste peut également servir à se cacher le visage dans une situation embarrassante (cela équivaudrait à rougir).

Tristesse : la même gestuelle de se cacher le visage peut aussi se faire pour la tristesse, pour cacher ses larmes.
Impuissance : on frappe une fois dans les mains en les laissant ensuite l’un dans l’autre. Peut aussi exprimer la nuance du khalas (c’est fini…).

Catastrophe : sentiment d’impuissance face à une catastrophe ; les deux mains viennent se poser sur la tête, la tête rentre dans les épaules et les yeux ont tendance à se lever. Voir vidéo [S] « Catastrophe ». Ce geste peut être effectuer aussi pour se faire pardonner à l’instant d’un bêtise commise, donc correspond à un « mille excuses » répété.

Peur : on se mordille les doigts à commencer par l’auriculaire.

Solidarité : de manière la plus générale, elle peut être signifiée par les deux mains (d’une même personne) qui se serrent l’une dans l’autre).

- Les fonctions biologiques :

Manger : paume vers soi, tous les doigts se regroupent aux extrémités et geste de la main vers la bouche.
Faim : main droite posée sur l’estomac. Peut signifier également avoir mal au ventre [S], cela dépend évidemment du contexte et des grimaces du visage.

Boire : soit la main mime de tenir un verre qui est porté à la bouche, soit idem avec le pouce relevé qui se dirige vers les lèvres.

Soif : on peut se tapoter la gorge à Taez. À Qades, on porte son index sur ses lèvres sèches (la lèvre inférieure). À Sanaa, les deux se font : l’index porté au lèvres ou un tapotement de la main droite sur la partie gauche de la gorge (moins fort que pour l’étranglement) et se complète de « Boire ».

Qat (ou prendre du qat) : l’index gauche tapote la joue gauche gonflée (par le qat ou artificiellement d’air). Si on tapote sa joue gonflée de l’index et ensuite d’un va-et-vient on se désigne soi et une autre personne, cela peut vouloir dire « on prend du qât ensemble ? ».

Avoir une relation sexuelle : poings fermés, les avant-bras sont à angle droit du corps et les bras font des mouvements de va-et-vient en ramenant les poings vers les hanches.

Dormir : la main droite ouverte vient se vers l’oreille droite et la tête vient se coucher dessus. Voir vidéo [S] « Dormir 1 ». Les deux mains ouverte et juxtaposée peuvent être utilisées également. Voir vidéo [S] « Dormir 2 ».

Mourir : la main se jette derrière l’épaule [S], à la manière de « Un temps passé ».


- Évaluer :

Bien, beau : index droit tape deux fois sur la narine droite avant de poursuivre son mouvement vers le bas ou un seul passage du doigt sans toujours toucher vraiment le nez. Cela s’accompagne parfois d’un « ÁÊ« Âʆ» (« men hena », littéralement « d’ici », c’est-à-dire de haut). On l’emploie pour une personne ou une chose (soulignant sa bonne qualité).

Bien, beau 2 : pouce levé devant soi, comme le signe « ok », qu’on peut souligner d’un « Tamâm ! » (très bien).

 Sale : pouce et index (et parfois le majeur), la paume vers soi (et autres doigts repliés), qui mouchent le nez (mime la morve qui coule). Geste masculin [T] ou masculin et féminin [S].

Sale 2 : geste féminin, idem « Sale », mais les autres doigts sont dépliés et le geste commencent depuis entre les deux yeux pour s’écarter vite du nez et se jeter devant soi [T].

Petit : main ouverte à plat, paume dirigée vers le sol, stationnaire au niveau des hanches.

Mince ou faible : index dressé qui oscille légèrement moins que pour dire « non », paume vers l’extérieure.

Grand : bras qui s’ouvrent au niveau de la poitrine ou au-dessus de la tête (pour une chose). On peut aussi faire le même geste que « Petit » mais la main cette fois à bonne hauteur (au-dessus de sa propre tête) pour une personne.

Fort : coude à 45° vers le bas, avec l’avant-bras qui se replie, poing fermé pour monter ses biceps. On peut aussi secouer les deux poings devant la poitrine (signifiant la vigueur) [S].

Fort (gros) :poings fermés, au niveau de la poitrine, coudes à la même hauteur et les épaules font le mouvement vers derrière. Voir vidéo [T] « Il est gros et fort ».

Un peu : paume vers soi, tous les doigts se regroupent aux extrémités, main présentée devant soi, avec un va-et-vient de haut en bas. Voir vidéos [T] « Un peu ou attend » ou [S] « Doucement ». On peut aussi présenter devant soi à l’horizontal l’index au-dessus du pouce [S]. Voir vidéo [S] « Un peu ».

Beaucoup : les mains ouvertes se faisant face devant la poitrine dessinent sur les côtés une bulle [T]. Ce geste peut dans certaines circonstances désigner une femme (les formes généreuses d’une femme) [S] et aussi les mains peuvent rester statiques.

Rien : L’avant-bras effectue un balayage de 90° au maximum, la main à plat, paume vers le sol. Voir vidéo [S] « Rien ».

Intensité : cette intensité peut signifier que c’est important, difficile, fort ou même urgent. Le pouce, l’index et le majeur sont réunis aux extrémités et cette main droite est secouée une ou deux fois très fortement.

- Compter :

Énumérer les chiffes : voir vidéos [T] « Compter jusqu’à 5 n° 1 », « Compter jusqu’à 5 n° 2 », « Compter jusqu’à 5 n° 3 » & « Compter jusqu’à 5 n° 4 ». Plus une autre possibilité : l’index droit tape sur chacun des doigts de la main gauche.

L’unité : index dressé, paume vers soi « habat ». Deux unités (habatin) : index et majeur dressés, toujours la paume vers soi.

Les unités de cinq : cinq doigts jetés devant soi. Fait des deux mains en même temps : une dizaine (deux fois cinq).

Les dizaines : comptées comme des unités, par exemple « 20 » donne un « V » de victoire paume vers soi.

Une moitié : rotation du poignet droit avec un mouvement des doigts qui caresseraient une sphère présentée devant soi sur son côté droit : la paume est donc au début vers le sol pour finir vers le ciel. Le tranchant de la main coupe (paume vers le sol, main à l’horizontal) d’un geste assez sec, auriculaire relevé. Voir vidéo [S] « Moitié ».

- Questions d’argent :

Avoir ou gagner de l’argent : l’index frotte le pouce de la même main, paume vers le ciel et les autres doigts repliés. On utilisait davantage avant le pouce placé sous le menton et jeté en avant [S].

Cher : mouvement des doigts droits, voir vidéo [T] « C’est cher ».

Trop cher (vol) : mouvement de la main comme un couteau, voir vidéo [T] « C’est un voleur ».

Avare : poing droit légèrement fermé, l’ongle du pouce touche les incisives avec mouvement de l’intérieur de la bouche vers l’extérieur. Ou à Qades, le poing très fortement fermé est présenté debout devant soi, le pouce par-dessus, serré également.

Demander de l’argent : c’est le geste des nombreux mendiants. La main droite est offerte ouverte, comme pour recueillir le don.

Refuser de donner de l’argent aux mendiants : désignation de Dieu : index tendu vers le ciel paume vers l’extérieur (et accessoirement les yeux levés vers le ciel. « Allah karim » (« „—Í«‰‰Á»). Voir vidéo [S] « Allah (mendiant) » et voir « Dieu ».

- Désigner :

Une personne (moi, toi, lui, nous) : désignation de la personne de l’index pointé ; et pour « nous » un moulinet de la main, paume vers le bas.

Une personne (moi) : ce geste remplace ou souligne un équivalent de « moi, je… » ou « personnellement… », la main (droite ou gauche) se pose sur la poitrine (gauche ou droite). Voir vidéo [S] « Moi, je ».

Faire venir quelqu’un de près : une personne proche, les quatre doigts se referment sur la main ouverte, paume vers le ciel au niveau de la poitrine. Voir vidéo [S] « Viens de près ».

Faire venir quelqu’un de loin : une personne éloignée, même mouvement que « Faire venir quelqu’un de près », mais paume cette fois-ci vers le sol et main levée devant et au-dessus du niveau de la tête. Voir vidéo [S] « Viens de loin ». Les trois techniques suivantes manquent de respect pour la personne visée. On peut claquer des doigts. Dans les écoles, normalement prévaut l’index levé pour demander quelque chose au professeur, mais il tend à être interdit, car les élèves claquent des doigts en même temps. L’autre technique est de frapper plusieurs dans les mains. La dernière technique : main fermée paume vers le ciel, l’index par un mouvement de va-et-vient (horizontal à vertical) est dirigé vers la personne désignée.

Appeler quelqu’un : deux personnes de sexes opposés (en présence d’invités) : on frappe à la porte, au mur ou dans ses mains. (« La voix de la femme est honteuse. »)

Un endroit : on désigne de l’index.

Un temps passé : la main indique ce qui est derrière le dos en rabattant (plus ou moins) les quatre doigts vers le dos. Voir vidéo [S] « Avant ».

Un temps présent : l’index désigne le sol devant soi. Voir vidéo [S] « Maintenant ».

Un temps futur : le bras se déploie devant soi, paume vers le ciel à la fin du mouvement.

Un document, une carte, un certificat… : désignation au niveau du poignet de la main ouverte doigts serrés. Voir vidéo [S] « Documents ».

Un livre : les deux mains s’ouvrent devant soi : au début les mains sont fermées, chaque doigt sur son équivalent, puis la main s’ouvre par le haut, le bas (au niveau de l’auriculaire) simulant la charnière. Parfois, les mains peuvent être présentées déjà ouvertes. Les doigts d’une main restent joints. Cela désigne le livre ou la lecture, mais également une région plate, où l’on peut lire comme dans un livre. Voir vidéo [S] « Livre ».

Un téléphone : les doigts de la main droite sont repliés sauf le pouce qui vient près de l’oreille droite et l’auriculaire qui vient près de la bouche, mimant le combiné du téléphone. Peut signifier également l’action de téléphoner.


- Positions symboliques du corps :


Premier pas du pied droit

Manger de la main droite

- Gestes typiquement religieux :

Dieu : il est souvent désigné de l’index tendu vers le ciel. Voir vidéo [S] « Allah ».

Prier : le geste peut autant être interprété comme un mime de la prière que des ablutions qui précèdent la prière. Les deux mains viennent ouvertes au niveau des oreilles, puis l’une dans l’autre devant soi (les ablutions lavent entre autres les oreilles et les mains). Voir vidéo [S] « Prière » (celle-ci dit « tu viens avec nous faire la prière ? »).

Un religieux : pour désigner une personne religieuse, un sheikh, la main mime la caresse d’une barbe assez longue. Voir vidéo [S] « Un religieux ».

- Se déplacer :

Arrêter un dabab : bras ballant, on lève la main (paume vers le sol) dans un mouvement lent de 45° vers le haut, main ouverte ou index légèrement tendu et on la rabaisse. Mouvement plus retenus : mouvements du poignet et des doigts qui se rabattent vers le sol.

Arrêter un dabab : on indique la direction voulue (voir ci-dessous).

Les directions des dababs :

Le marché au qât : on faut le geste du qât. Voir « Qat (ou prendre du qat) ».

Rond-point : si le trajet passe par tel rond-point gaula (ÕÓË«…), l’index dessine pointé vers le sol un cercle dans son sens trigonométrique.

 

Bibliographie.

Abélès M. – Culturalisme in Encyclopædia universalis version 5, cédérom, Paris, 1999

Battesti V. – Les échelles temporelles des oasis du Jérid tunisien, Anthropos, vol. 95, 2000, pp. 419-432.

Battesti V. & Puig N. – Le sens des lieux, Espaces et pratiques dans les palmeraies du Jérid (Sud-Ouest tunisien), JATBA, Revue d’ethnobiologie, 1999, vol. 41 (1-2) [sous presse].

Clément, J.-F. – La gestuelle marocaine dans la communication non-verbale, Colloque international Le corps et l’image de l’autre, fév. 1989, Marrakech, Université al-Qâd'î 'Iyâd'.

Hall, E. T. – La dimension cachée, Ed. du Seuil, 1971 [traduit de l’américain 1966 par A. Petita], Paris.

Herrera, P., Bourgeois, P., Cheung, N., Hess, U. – La communication émotionnelle entre individus de cultures différentes. Affiche présentée au XXIe congrès de la Société Québécoise pour la Recherche en Psychologie, 30-31 octobre 1998, Montréal, Québec.

Leftah M. – Pour une nouvelle approche : Le corps dans la culture arabo-islamique, Le Temps du Maroc, Février 2000 - N° 224.



[1]   Des perceptions cognitives des espaces (Battesti & Puig, 1999) et des temps (Battesti, 2000) et des perceptions sensorielles : j’ai dans mes projets à court terme la mise en place d’une anthropologie du bruit ou une anthropologie du monde sonore à l’instar de ce qui peut se faire sur le goût et les saveurs (voir le travail de Françoise Aubaille).

[2] En zone urbaine, ce vêtement, ample et noir, couvre l’ensemble du corps de la femme sans laisser transparaître les formes du corps (désirables et perturbatrices), sinon une vague silhouette. La tête elle-même est dissimulée et dans la plupart des cas une mince ouverture laisse paraître les yeux (quand la voilette n’est pas rabattue). Quelques femmes minoritaires laisse leur face visible, mais jamais les cheveux, la gorge ou même les oreilles. Les mains elles-mêmes peuvent être gantées de noir. Quoiqu’il en soit, le moins que l’on puisse dire d’une telle attitude face au corps féminin est qu’elle n’est pas indifférente que ; qu’on ne parle pas là d’adaptation à l’environnement, j’ai vu pour ma part assez d’étudiantes s’évanouir lors de grandes chaleurs !